jeudi 21 mars 2019

Etat des lieux des listes se présentant aux européennes .

à la droite de l’extrême droite c'est à dire plus à droite que le RN, quartes listes veulent se présenter. Si on peut être sûr que les néo fascistes de la dissidence française ne pourront pas se présenter , les trois autres listes devraient pouvoir . Le Parti de la France conglomérat d'ex gloires du FN de Jean-Marie Le Pen devrait faire un score mineur,  les catholiques intégristes Civitas se compter et l'alliance du SIEL et de Renaud Camus voir ce que pèse un courant identitaire racialiste dur. au moins , une des trois listes devrait pouvoir se présenter
à l'extrême droite, trois listes sont quand à elles sûres. Les Patriotes de Florent Phillipot sur un créneau social souverainiste et xénophobe mais non identitaire et assimilationniste stagnent à 1% dans les sondages et sont en concurrence directe avec l'UPR dont nous parlerons plus loin. Le RN de Marine Le Pen a des vents favorables et veut se positionner comme le principal opposant à Macron . Il est en moyenne à 21% dans les sondages. Il a abandonné la ligne eurosceptique et va vers une ligne ultra libérale en économie abandonnant son discours social et plus identitaire sur l'immigration.  Enfin, l'alliance de Debout La France de Dupont Aignan avec le parti chrétien démocrate et le cnip tente de faire l'"union des droites" sur un créneau libéral identitaire conservateur. Après une relative dynamique, leur campagne se passe mal et ils sont donnés tout juste au dessus de la barre d'éligibilité de 5%.
à droite LR est pour l'instant seul (les candidatures des libertariens et du candidat perpétuel Miguet étant peu sérieuses). Après avoir nettement baissé , la courbe dans les sondages de LR se redresse et ils sont donnés entre 13 et 14%. Leur ligne avec Bellamy est libérale conservatrice.
Au centre droit, LREM (qui est maintenant clairement à droite) et l'UDI se présentent : LREM va fédérer ses alliés (Agir, modem etc). L'UDI voulait incarner un centre droit alternatif mais l'effet gilets jaunes pousse cet électorat à faire bloc autour de Macron et leur score est donc très bas. LREM est en tête mais n'arrive pas à élargir le socle de Macron de 2017 voire est un peu en dessous.
Au centre gauche , les listes sont nombreuses. EELV a achevé ne mue libérale libertaire en rompant avec un discours proche de la gauche radicale et espère par ce biais remplacer le PS auprès d'un électorat de centre gauche. En même temps le PS s'est rallié à Place Publique dont le discours bobo intello est peu différent de celui d'eelv et qui tente de fédérer plusieurs micro partis de nouvelle donne à l'UDE en passant par les radicaux de gauche ou le diem 25. Je pense que ce choix est catastrophique pour le PS car il va pousser les derniers vallsistes ou centristes à rallier LREM malgré la droitisation de Macron, va dégoûter les militants et les cadres non situés dans les métropoles du PS et que sur ce créneau de centre gauche libertaire , le PS sera toujours moins crédible qu'eelv. ELV peut viser les 10% d'autant qu'ils ont intégré l'aei pour ne pas avoir de liste écologiste ni droite ni gauche leur prenant des voix et le PS n'est pas assuré de passer la barre des 5%.  Enfin, la liste eurofédéraliste progressiste de Volt europa devrait arriver à se présenter. Efin, la liste écologiste indépendante du MEI et de Delphine Batho peut priver de précieux points les écologistes.
à gauche trois partis devraient se présenter : Génération;s et le PCF devraient lutter pour la barre des 3%. Le PCF car malgré une bonne liste, il n'arrive pas à convaincre au delà de son cercle militant lui même endommagé par des polémiques récentes et génération;s car il n'arrive pas à se différencier d'EELV voire du PS version Glucksmann mais avec moins de base électorale et quasiment aucun allié européen. Enfin, LFI est le grand perdant de la première séquence. Alors qu'elle était vue comme une des premières forces d'opposition avec les 20% fait par Mélenchon, elle souffre de la fin du vote utile poussant l'électorat de gauche à aller voter ailleurs et de la démobilisation de son électorat. Mais elle souffre aussi d'une stratégie qui a à la fois purgé les opposants à une liste libertaire comme kuzmanovic en essayant d'attirer un électorat EELV compatible(avec le choix d'ne tête de liste peu eurosceptique) et en même temps d'une stratégie conjuguant un fond très à gauche et des discours ciblant les médias ou un soutien total aux Gilets Jaunes. Résultat des courses : l'électorat de gauche y étant opposé y est peut ètre plus opposé qu'à un coup de barre à droite su les sujets non socio économiques et l'électorat le plus proche d'une ligne kuzmanovic s'en va ailleurs vers l'upr ou l'abstention.
Enfin, à l'extreme gauche le NPA va essayer de présenter une liste pour ne pas disparaitre au profit de LO. LO a une liste déjà annoncée et avec ses 8000 militants moines soldats devrait faire 200 000 voix comme d'habitude.
Enfin, concernant les autres listes, nous aurons une liste sur le créneau eurofédéraliste, une liste ilamiste turque (parti égalité et justice) dont il sera intéressant d'examiner le score, une liste antispéciste animaliste dont on peut se demander si elle aura un électorat écologiste réfractaire à eelv, la liste de l'éruptif Jean Lassalle dont le potentiel reste assez flou et la liste de l'UPR qui est scotchée à 1% mais dispose d'une armée de militants fanatisés et d'un discours simple car monothématique

Pour résumer l'enjeu pour LREM et le RN est d'arriver en tête.
Pour LR de s'imposer clairement comme le troisième parti et d'avoir au moins 15%
Pour EELV et LFI d'avoir le leadership sur ce qui reste de la gauche et d'atteindre les 10%
Pour Place Publique PS et DLF de dépasser les 5% pour avoir des élus.
Pour l'UDI, le PCF et Génération;s de dépasser les 3% symbole de remboursement.

Opinion polling for the European Parliament election, 2019 (France).png

mercredi 20 février 2019


Les verts au niveau  de l'UE : de la gauche verte aux libéraux libertaires.

Les mouvements écologistes sont issus d’une deuxième gauche se centrant moins sur les questions socio-économiques et plus sur les questions « post matérialistes » c’est-à-dire liées aux questions de société , à l’immigration ou au multiculturalisme. Ce sont également des partis favorables à l’intégration plus poussées dans l’UE Enfin, ils ont un primat sur la question écologiste. Les clivages se font donc sur les questions socio-économiques et sur l’articulation entre les questions écologiques et les autres questions appelées « post matérialistes » (selon la typologie de Ronald Inglehart). Mes sources seront https://en.wikipedia.org/wiki/Greens%E2%80%93European_Free_Alliance et https://www.foederalist.eu/2019/01/europawahl-umfragen-januar-2019.html

En premier lieu, la famille historique est celle que j’appellerais les verts de la gauche libertaire. Il s’agit des partis très à gauche sur les questions non directement socio économiques et très à gauche sur les questions socio-économiques. Ce sont les partis verts historiques d’Autriche Benelux, EELV en France, les partis verts suédois et danois (celui-ci étant d’ailleurs issu d’une scission de gauche des sociaux-démocrates). Cela inclut aussi les écologistes espagnols et italiens. Enfin, cela incluait les verts allemands. Ces partis avaient 20 députés sur 41 du groupe Vert et régionaliste en 2004 (sans compter les 13 députés verts allemands). En 2009, suite au score d’EELV ils avaient 31 députés sur 53 (et 14 députés allemands). Mais en 2014, ils ne représentaient plus que 24 députés sur 50. Enfin, en 2019 ils ne devraient avoir que 20 élus sur 50 du fait de leur déclin en Autriche, en France et en Suède que ne compensent qu’imparfaitement les gains dans le Benelux. De plus, cela passe sous silence le fait que les verts suédois n’ont pas semblé indignés par le programme économique libéral de coalition et que si groenlinks n’a pas participé au gouvernement néerlandais c’est en raison de désaccords sur l’immigration bien plus que sur l’économie. On voit donc là que même pour l’aile gauche des verts les questions socioéconomiques semblent secondaires.

Mais l’élément décisif est la montée du bloc libéral libertaire. En effet, les partis verts sur cette position sont libertaires sur les questions post matérialistes mais libéraux sur les questions socio-économiques. Cela va avec le fait que la composition sociologique des partis verts est certes jeune et féminine ce que ces partis mettent en avant mais est aussi en moyenne plus aisée que la moyenne de la population. Les verts finlandais ne se définissent donc pas comme de gauche et progressivement les verts allemands ont purgé leur aile gauche au point actuellement de rentrer en compétition avec l’électorat de la CDU. Enfin, en Europe de l’est els partis verts sont essentiellement des partis libéraux avec un « supplément d’âme » écologiste. Les verts finlandais et allemands auront 19 députés d’après les projections mais devraient orienter le groupe vers cette voie du fait du poids prépondérant des verts allemands et de ce que nous avons vu sur l’aile gauche des verts.
Enfin, on note l’émergence d’un courant écologiste conservateur. Il s’agit essentiellement du petit parti écologiste démocratique allemand qui se différencie des verts allemands sur les questions de société mais aussi du parti vert lithuanien à la fois libéral économiquement et très conservateur sur les questions de société. Celui-ci étant au pouvoir, il devrait avoir 3 élus auquel se joindrait celui du parti écologiste démocratique.

Enfin, trois partis gravitent autour du groupe écologiste sans être membre du parti écologiste. Il s’agit tout d’abord des régionalistes indépendantistes. Ceux –ci partagent avec l’aile gauche verts un progressisme sur les questions de société et un discours de gauche sur les questions socio-économiques dans le cas des espagnols. Mais c’est moins évident pour le parti catalan de Puidgemont qui devrait quitter l’alde et l’union lettone russe n’est pas très progressiste sur les questions de société disons. Ils devraient avoir entre 3 et 4 élus mais l’actualité espagnole peut les renforcer. Enfin, la question pourra se poser pour eux s’ils mènent une campagne européenne commune avec les indépendantistes de droite (la nva flamande) de rester dans le groupe écologiste ou d’y attirer la N VA.

Les partis pirates sont séparés des verts mais devraient être dans le même groupe du fait de leur proximité sur les questions de société. Cependant, les quatre élus (1 en Allemagne et 3 en République Tchèque) devraient être sur une ligne libérale libertaire qui est celle de leur parti.
Enfin, l’aile gauche pourrait être renforcée par la scission de Syriza qui serait exclu de la gauche unitaire européenne et rejoindrait les verts ou le PSE avec ces 6 élus.

En conclusion les équilibres devraient virer vers une ligne libérale libertaire. En effet, non seulement les tenants de cette ligne seront renforcés après les élections mais surtout les partis sur une ligne de gauche libertaire sont très perméables à une évolution vers cette ligne (voir les propos de yannick jadot sur les gilets jaunes) et devraient donc y être attirés si le rapport de force interne se modifie ce qui sera le cas

lundi 21 janvier 2019

Elections européennes : la gauche radicale à la croisée des chemins. Etat des lieux et des forces en présence.

La gauche radicale dans mon appellation inclut les partis appartenant au groupe de la gauche unitaire européenne et ceux n'y appartenant pas mais étant de tradition marxiste ou écosocialiste. Je me propose de lister les partis y appartenant et pouvant avoir des élus ou des élues ainsi que les différences idéologiques au sein de cette famille unie par une critique très forte du libéralisme économique. Pour les estimations je me baserais sur les sondages publiés par Europe Elects et par https://www.foederalist.eu/2019/01/europawahl-umfragen-januar-2019.html

La première sous famille  de cette famille politique est le pôle communiste orthodoxe. Celui ci peut être caractérisé par une volonté de sortir de  l'Union Européenne et une attitude peu critique de l'héritage de l'URSS. Ils sont en moyenne moins libertaires sur les questions sociétales (les communistes portugais on voté contre l'euthanasie ou le part communiste de Grèce contre le PACS) ou liées à l'immigration (le parti communiste de Hongrie ou de bohème et Moravie sont assez anti immigration https://www.youtube.com/watch?v=LwsYSLSVF58 ). Ils développent des structures très englobantes leur assurant un socle électoral mais limitant leur capacité à s'étendre au delà. Enfin, ils conjuguent marxisme intransigeant et attachement à l'état nation. Quatre d'entre eux sont assez forts pour pouvoir aller au Parlement européen . Le Parti communiste portugais et le parti communiste de Boheme et Moravie d'après les sondages devraient avoir respectivement 1 et 2 députés alors que le parti communiste grec devrait en garder 2. Enfin, le parti communiste chypriote original car conjuguant une pratique très réformiste et social démocrate du pouvoir (qu'il a pratiqué étant un des deux partis majeurs de Chypre) à une pureté idéologique sans faille dans son programme peut garder  deux élus . En tout cela ferait 7 élus pour cette famille politique. Les autres partis de cette mouvance  sont faibles (parti communiste slovaque ou autrichien végétant à 1% des voix) ou carrément marginaux.

La seconde sous famille est celle que l'on peut appeler euro-communiste. Elle représente les partis communistes ou les alliances de partis englobant les ex partis communistes devenus favorables à l'Union Européenne et également plus libertaires sur les questions non socio économiques ainsi que très critiques vis à vis de l'URSS. Il s'agit notamment de la gauche radicale italienne (elle même extrêmement divisée sauf le temps de cartels électoraux) , de Syriza au pouvoir en Grèce , du PCF , de Die Linke en Allemagne et du parti "La Gauche" au Luxembourg ainsi que d'autres partis plus petits. Ils disposent de 18 députés européens actuellement. D'après les derniers sondages Syriza devrait en avoir 6 et Die Linke 9, les autres partis qui en sont membres ne devraient pas avoir d'élus. Cependant , on peut se demander si les députés de la gauche unitaire espagnole, bien qu'alliée à Podemos, du parti de la gauche européenne pourraient les rejoindre.

L'adhésion du fait de la peur de sortir de l'UE de Syriza à un programme d'austérité a scindé cette gauche. Une troisième famille peut être définie autour de la fédération de partis Maintenant le Peuple . On peut l'analyser comme ayant moins peur d'aller au rapport de force au sein de l'UE et de menacer d'une sortie de l'UE. Elle est souvent constituée de nouveaux partis politiques issus de scissions d'ailes gauches des partis sociaux démocrates sans rapport direct avec le communisme et l'histoire des partis communistes européens sauf dans le cas de mouvances issues du trotskisme. Enfin , ce sont des partis se réclamant d'un populisme de gauche opposant le peuple aux élites. Ils sont regroupés dans  l'alliance Maintenant le Peuple autour de LFI , de Podemos , du Bloc de Gauche portugais et de la gauche radicale scandinave auquel on peut adjoindre l'unité populaire grecque. Ils sont donnés dans les derniers sondages à 26 élus alors qu'ils en avaient 12 (du fait du faible score de la FI en 2014). Cependant le point d'orgue des résultats de ces partis semble plus avoir été atteint entre 2015 et 2017.

Cependant, un débat interne à ces partis a éclaté sr la nature du "populisme de gauche". Pour certains membres de ces partis, le populisme de gauche défini juste comme un relookage du discours opposant le peuple et l'élite n'était pas fonctionnel. Selon eux , la gauche radicale pour récupérer l'électorat ouvrier à l'extrême droite devrait remettre en cause son discours sur les questions sociétales et surtout sur l'immigration. Il est encore trop tôt pour savoir si ces partis vont percer mais on peut noter plusieurs scissions récentes tels que celle de la tendance sur cette ligne à LFI , du numéro 2 de Podemos Irrigon ou du mouvement Aufstehen issu de Die Linke. Enfin, en Italie il s'agit du mouvement Patrie Et Constitution de Stefano Fassina. On ne sait pas si les mouvements cités vont se présenter et quel serait leur potentiel électoral mais on peut au moins supposer qu'il n'est pas négligeable en Allemagne et en Espagne.

Enfin, un dernier groupe hétéroclite regroupe les partis forts au niveau national mais ne rentrant dans aucune de ces cases. On peut y trouver pêle mêle les républicains très sociaux du sinn feinn assez eurosceptiques, qui étaient très conservateurs sur les questions de société mais évoluent vers des positions plus libertaires et étaient la branche politique de l'IRA  et les partis néo maoistes que sont le parti socialiste néerlandais et le PTB PVDA belge. Ceux ci sont assez eurosceptiques et proches de la famille de "Maintenant le Peuple" dont ils se diffèrent par leur histoire et leurs références idéologiques (et le plus fort nationalisme du parti socialiste). Enfin, le parti ,la Gauche slovène semble être une union classique de gauche radicale mais avec personnalité importante le philosophe inclassable Slavoj Zizek. Ces 4 partis devraient obtenir 8 députés contre 6 dans le dernier Parlement Européen. Encore plus en marge on peut noter les partis animalistes qui devraient avoir un député aux pays bas et en Allemagne et dont l'adhésion à la gauche radicale est en grande partie technique (même si elle s'appuie sur quelques convergences).

Cela ferait 55 élus contre 54 actuellement soit une quasi stagnation. Pour avoir un groupe, il faut 25 élus de 6 pays différents. Dans cette optique deux scénarios sont possibles: une grande réconciliation dominée par Maintenant le Peuple et s'appuyant sur le fait qu'aucune autre sous famille ne peut actuellement rassembler des élus de 6 pays et 25 élus. Dans cette optique, seul Syriza serait exclue. Ou une scission en deux avec maintenant le Peuple formant un groupe en intégrant le sinn feinn et les partis néo maoïstes et die linke ralliant à son drapeau de justesse la plupart des partis communistes orthodoxes au nom du passé commun et ayant un groupe de justesse. Mais le trop peu d'élus me fait pencher pour la première option. La gauche radicale devrait donc stagner mais se recomposer avec le chant du cygne du courant eurocommuniste.

De Minoritaire et alors ?

mercredi 16 janvier 2019


 Analyse critique d’un article du « Monde » : https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/01/14/dans-le-laboratoire-economique-du-populisme_5408667_3234.html 

Le journal « le Monde » a fait un article sur le populisme économique en Europe de l’Est qui mélangerait des mesures sociales ciblées et du libéralisme économique. Nous apprenons que celui-ci vise à « gommer les excès des politiques de privatisation et d’ouverture d’après 1989 tout en créant une élite économique nationale ». Sauf qu’en analysant en détail les programmes de la Hongrie et de la Pologne comme le fait l’article, on voit des différences très nettes au contraire.

En effet, le gouvernement Orban a mélangé à quelques mesures sociales (taxe de crise sur les banques, des mesures ultra libérales (réduction du salaire des fonctionnaires, impôt sur les sociétés le plus faible d’Europe, flat tax et libéralisation du marché du travail avec nette hausse du plafond légal des heures supplémentaires).

A l’inverse, le gouvernement du parti Droit et Justice en Pologne a mis en, place, ce que le Monde appelle, une « surenchère » de mesures sociales qui correspond à un programme économique redistributif de gauche. L’âge de la retraite est baissé à 60 ans alors qu’il était de 65 ans pour les hommes et de 67 ans pour les femmes. Un programme d’allocations familiales a fait baisser l’extrême pauvreté infantile de 94%. L’impôt sur les sociétés a bien été baissé mais uniquement pour les PME TPE ce qui peut faire partie d’un programme social même si cela n’aide pas à créer des champions nationaux.

Certes, l’article est intéressant sur bien des aspects quand il pointe par exemple les faiblesses en terme de démographie ou de recherche de ces pays. Il pointe aussi des réelles convergences par exemple sur le rapport à la banque centrale dont les deux pays réduisent l'indépendance, dogme de l'économie orthodoxe. Cependant, il mélange sous l’appellation de « populisme économique » deux programmes ; un ultralibéralisme économique mâtiné de mesures liées au nationalisme économique et un programme redistributif classique d’une gauche keynésienne s’expliquant aussi par l’électorat ouvrier de Droit et Justice et par ses liens avec Solidarnosc, un des premiers syndicats de Pologne.

 Enfin, si ce mélange permet au Monde d’amalgamer les gouvernements très à droite d’Europe de l’Est qu’il n’aime pas, sous une politique économique commune ; c’est aussi une tentation à gauche où le discours facile et paresseux est souvent d’affirmer que la droite ultra conservatrice ou l’extrême droite ont un discours identitaire pour masquer leur libéralisme économique. Il serait temps d’admettre que dans certains cas comme Droit et Justice, c’est contredit par les faits et que Droit et Justice mène un gouvernement social. Cela ne veut pas dire les soutenir mais juste être lucide et admettre la vérité même quand elle dérange la gauche. Enfin, cela permet à la gauche d’avoir une analyse des alliés et des adversaires au niveau économique.

Minoritaire et alors ? . 

jeudi 29 novembre 2018

Quelques réflexions sur les  mécanismes politiques.


 D'abord concurrent : celui-ci partage avec vous des causes proches et une vision du monde assez proche.Mais vus avez des divergences de tactique ou sur tel ou tel point. Or le concurrent est celui où vous pouvez le plus trouver de nouveaux membres (pour développer votre vision politique) et celui que vous croisez le plus en moyenne dans vos contacts politiques. Donc c'est celui avec qui vos divergences sont les plus visibles quotidiennement et exaspérantes. Un concurrent est crispant au possible, se bat contre certaines de vos idées  pied à pied, en utilisant les outils démocratiques, le droit et le vote, vous  fait dépenser beaucoup de temps et d’énergie.

L'adversaire lui partage avec vous un cadre minimum de valeurs communes mais vous avez des visions radicalement différentes. Il se définit surtout comme ce qui n'est pas le concurrent , ce qui est l'autre politique mais un autre accepté. Perdre contre eux c'est perdre sur toutes vos valeurs et vos idées et vos politiques mais ca reste "acceptable".  à noter par contre que le concurrent devenu adversaire est souvent haî car vu comme un traître.

La frontière avec l'adversaire radical est dure à trancher pour chaque groupe politique et dépend de chaque groupe voire de chaque individu et de ses positions sociales (sachant que les lignes de fracture peuvent être droite gauche mais peuvent aussi être sur un seul sujet vu comme central). Définissons le comme celui qui si il arrive au pouvoir en respectant les règles vous ne sauriez pas quoi faire (je reconnais qu'en tant qu'homme de gauche universaliste ce serait mon cas si les identitaires ou le PIR gagnait les élections). Ca dépend de chaque groupe politique et / ou social (pour les coptes en Egypte c'était quand les frères musulmans avaient gagné etc etc etc). C'est celui avec qui vous ne partagez rien. Dans un sens les tensions actuelles aux USA peuvent être liées au fait que pour de plus en plus de républicains et de démocrates l'autre n'est plus un adversaire mais un adversaire radical.

Enfin, l'ennemi n'est pas vous , il n'appartient pas au groupe de la prise de décision (u alors pour s'en emparer et le détruire) et la logique avec lui est le combat. On peut penser à un pays ennemi dans le cadre d'une guerre mais aussi à une guerre civile où l'adversaire (souvent déja vu comme adversaire radical devient un ennemi car des groupes assez importants basculent totalement dans une logique d'adversaire radical (guerre de sécession aux usa). Enfin, pour un exemple français on peut penser aux membres de l'OEI et à leur discours (que j'ai analysé dans http://minoritaire-et-alors.blogspot.com/2018/07/fiche-de-lecture-le-livre-que-je-vais.html ) . L;ennemi se définit par une vision du monde en rupture totale avec les éléments fondamentaux de ce qui est vu comme le pacte social et avec la capacité de le menacer effectivement (un conspirationniste qui pense que les reptiliens dirigent sn pays sur son ordi n'est pas un ennemi car il n'est lié à aucun groupe actif prévoyant de tuer des "reptiliens" et se content e de rager derrière son ordinateur.

vendredi 16 novembre 2018

Quelques réflexions sur les procédures démocratiques

On peut définir la démocratie comme "le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple" .ce qui implique une série de principes comme l’égalité décisionnelle pour tous et toutes, l’égalité d’information, la souveraineté du pouvoir collectif. Cependant , cela pose une question essentielle : Comment le peuple choisit t-il les lois qu'ils appliquera
En premier lieu le choix est entre la démocratie représentative et la démocratie directe. Dans la démocratie directe , le peuple vote lui même les lois alors que dans la démocratie représentative , les lois sont votées par des individus représentant le peuple. La démocratie directe semble donc plus démocratique .
Mais nous allons étudier les formes que ces types de démocraties prennent.
Concernant la démocratie directe , une première application est le référendum : les représentants du peuple lui proposent une loi qu'il approuve ou non. Mais un tel mécanisme n'est pas tellement démocratique car il laisse entière deux questions : qui choisit la question et de quelle manière sera t-elle formulée . Le peuple dans cette application de la démocratie directe ne fait guère qu'approuver ou rejeter des mesures choisies ainsi que leur agenda par ses représentants .
La forme du référendum d'initiative populaire sur le modèle suisse respecte plus la démocratie directe. En effet , elle permet à une partie suffisante du peuple de poser les questions pour le référendum si un nombre suffisant de signatures sont réunies.
Enfin, la démocratie directe est souvent associée à sa forme la plus pure qui est la réunion du peuple dans une assemblée ou une agora afin d'y proposer les lois et de les voter. On peut en voir une expression dans la démocratie athénienne ou encore dans une forme différente dans les assemblées générales. Qu'en dire ? Concernant la démocratie athénienne , celle ci était possible pour un nombre limité de citoyens (130 000 ) à son apogée car elle excluait les métèques les esclaves les femmes et les enfants. De plus et surtout le lien entre les citoyens était fort du fait des citoyens soldats. Allons dans le présent et examinons la démocratie directe d'assemblée générale de la gauche Etudiante ou de nuit debout. Celle-ci n'est pas à proprement parler une démocratie directe dans le sens où ce sont plus des groupes d'organisation de lutte mais empruntent à la démocratie directe des formes et parfois veulent la mettre en pratique (cas de Nuit Debout). Celle ci montre à mon sens les défauts d'un tel mécanisme. En premier lieu, la démocratie directe favorise bien plus que la démocratie représentative , une minorité organisée et soudée politiquement qui sait se répartir pour faire masse ou encore qui sait sembler plus convaincue. En outre, la démocratie directe privée du lien qu'avaient les citoyens soldats des cités grecques s'organise en excluant explicitement les gens définis comme des "ennemis politiques" ou en faisant en sorte qu'ils et elles s'autoexcluent . En effet' ceux ci et celles ci savent qu'ils seront à priori minoritaires et qu'ils le seront dans un débat direct ce qui peut être risqué si il est houleux. Enfin, la démocratie directe d'assemblée commence souvent avec des rituels (amphi renommé en hommage aux "luttes" , précision d'un langage spécifique en général maitrisé par le camp politique l'organisant etc ) qui ont pour effet que les gens n'appartenant pas au dit camp politique ne se sentent pas légitimes. Cela n'est pas un problème dans le concept d'organiser des grèves ou des manifestations. Mais ceci montre amplement que ça ne peut pas devenir une forme démocratique dans le sens où une telle forme exclurait la majorité des citoyens. Dans un autre sens que pour les AG , on peut penser au surinvestissement des militants et militantes de la manif pour tous sur la consultation dans la bioéthique faisant que la consultation a surtout reflété leur avis

Enfin, nous allons examiner les différentes formes de démocratie représentative.
Nous avons d'abord , la démocratie représentative telle que nous la connaissons. Nous votons pour élire des gens prenant des décisions en notre nom. Les élus représentent donc la nation dans son ensemble et non une partie d'elles et chaque citoyen est vu comme une monade ayant le même poids que les autres (égalité du vote). Ce système a ses avantages : il est celui permettant de recueillie l'avis du plus grand nombre et assurant donc la représentation la plus démocratique. Il a ses défauts : manque de contrôle des citoyens et citoyennes sur celles et ceux qu'ils élisent , pas de représentation des "corps intermédiaires".Enfin, un tel modèle peut aussi être vu comme aristocratique (selon Montesquieu) car les représentants choisi appartiennent surtout à une classe sociale élevée (l'élection étant d'autant plus aristocratique que le système des partis est faible et que l'indemnité parlementaire est limitée)
C'est le modèle le plus connu, c'est pourquoi je vais plus détailler les deux autres. Le second est la démocratie représentative corporatiste. Dans ce système différents groupes de la société élisent leurs représentants. On peut penser au cas libanais où les élus sont distribués entre les différentes communautés religieuses et élues par celles-ci. C'est aussi le modèle de tous les types de fédération (et par exemple du Sénat américain). Ce modèle permet de mieux représenter les citoyens et citoyennes dans le sens où il prend en compte leurs appartenances autres que celles à la nation tout en assurant une meilleure représentativité aux groupes minoritaires si il est conçu dans ce but. Mais il remet en cause le principe égalitaire et donc démocratique du vote (les états généraux correspondaient à cette forme). De plus, le fait que les citoyens soient définis par rapport à une autre appartenance qui détermine leur poids politique fait que la définition des autres appartenances devient un enjeu politique de plus en plus tendu (voire l'Inde avant la partition ou la guerre civile au Liban°). Enfin, ce modèle existe cependant dans la démocratie représentative classique. En effet, la parité en est une application limitée de même que les scrutins représentatifs territoriaux où les élus et élues représentent aussi leur territoire (ce qui assure une meilleure représentation à des territoires ultra-marins tels que wallis et futuna ou saint pierre et miquelon). Enfin, un cas limite en est les districts minority majority mis en place aux USA au début par les démocrates pour assurer une meilleure représentation des minorités ethniques.
Enfin, le dernier modèle est la démocratie représentative par tirage au sort. Dans ce modèle, les représentants sont tirés au sort. Ce modèle ne peut selon moi pas être le seule de la démocratie représentative. En effet, ^le tirage au sort fait qu'il y a une probabilité faible que la population ne soit absolument pas représentée. De plus, cela supprime les choix politiques et la participation au politique de la plus grande part des citoyens. Mais ce système non aristocratique et égalitaire pourrait être testé pour le développement d'une chambre consultative pouvant proposer des projets de lois par exemple.

mercredi 5 septembre 2018


D’un éthos guerrier à l’autre


Pour des raisons de connaissance personnelle et d’influence sur les manières modernes de concevoir la guerre je me focaliserais sur les éthos guerriers d’Europe occidentale en restant ouvert à toutes remarques et suggestions.

Pendant longtemps, la guerre a été dominée par ce que je vais appeler l’éthos du guerrier. Celui-ci repose sur les présupposés suivants : la guerre est naturelle. Elle a des aspects beaux et justifiables (Robert E. Lee: "Heureusement que la guerre est si terrible, autrement nous finirions par trop l'aimer"). En effet, elle est moment de fraternité extrême entre les hommes, défense des siens en mettant sa vie en jeu et compétition aux enjeux suprêmes (thème d’ailleurs très finement analysé par l’auteur de science-fiction Iain M Banks dans L’homme des jeux qui commence par cette phrase merveilleuse « Voici l'histoire d'un homme qui partit très loin et très longtemps dans le seul but de jouer à un jeu. Cet homme est un joueur-de-jeux nommé "Gurgeh". Son histoire débute par une bataille qui n'en est pas une et s'achève par un jeu qui n'en est pas un.
Moi ? je vous parlerai de moi plus tard.
Ainsi commence l'histoire. (p. 23) ».

Si la guerre est vue comme une compétition, je peux admirer mon adversaire, particulièrement s’il est un soldat. Des exemples historiques peuvent être donnés, que ce soit entre des condottieres italiens rivalisant d’habileté stratégique ou dans les chansons de geste. Même dans la Chanson de Roland qui décrit une guerre vue comme sainte envers les infidèles, le chroniqueur admire l’habileté martiale de tel ou tel dirigeant sarrasin. Lisez par exemple cette description de l’émir de Babylone « L’ÉMIR est semblable à un vrai baron. Sa barbe est blanche comme fleur. Il est très sage clerc en sa loi ; dans la bataille il est fier et hardi. Son fils Malpramis est de grande chevalerie. Il est de haute taille, et fort ; il ressemble à ses ancêtres. Il dit à son père : « Or donc, sire, en avant ! Si nous voyons Charles, j’en serai fort surpris. » Baligant dit : « Nous le verrons, car il est très preux. Maintes annales disent de lui de grandes louanges. Mais il n’a plus son neveu Roland : il ne sera pas de force à tenir contre nous. »
Une telle vision est immensément plus forte dans les récits épiques ne reposant pas sur un affrontement religieux. Dans l’Iliade ou les Nibelungen chaque camp a ses raisons, chaque camp a des hommes d’honneur (personnellement Hector est un de mes héros fétiches).
Enfin, même dans des guerres de conquête coloniale très violentes, des restes de cette conception se sont faits jour via la volonté de trouver en face des chefs identifiés comme « adversaires honorables » qu’il s’agisse d’Abd El Kader  pour la conquête de l’Algérie ou de l’admiration que porte Bernard Diaz Del Castillo  à des figures de la résistance aztèque aux espagnols.

Il ne s’agit pas d’idéaliser cette conception. Elle va avec une conception de la guerre comme naturelle un mépris plus ou moins fort des civils qui peut être absolu quand ceux-ci sont définis comme radicalement étrangers (Bernard Diaz Del Castillo explique sans problème qu’il a été l’avocat auprès de Cortez des demandes des soldats de troupe qui trouvaient que Cortez et son staff se réservaient les plus belles indiennes). Qui plus est, elle suppose un rapport à la violence et à la mort que nous avons perdu, ce qui est assez positif et semble lié au fait de voir son adversaire, ce qui est moins le cas avec les armes modernes (nous ne considérons plus que la guerre est « le plus noble des métiers »). Elle s’enracine dans une vision aristocratique où cette expérience partagée se fait entre nobles (ou équivalents) au sens d’entre la couche supérieure se consacrant à la guerre.   Enfin, elle suppose une idée de l’armée qui a pu justifier le soutien au régime nazi « https://www.lexpress.fr/informations/august-von-kageneck-un-allemand-dans-la-debacle_607412.html « 

En effet, nous l’avons perdu : paradoxalement ce qui montre à quel point cette conception a été perdue est de voir ce qu’il en est resté. Pendant longtemps, des réactions instinctives faisant fraterniser des soldats qui se retrouvaient dans le même trou d’obus (ou ce récit d’un soldat français disant qu’en janvier 1940, il n’avait pas pu tirer sur un éclaireur allemand car celui-ci était en train de pisser). Elle témoignaient de l'idée d'une fraternité des soldats à la base qui pouvait exister. C’est aussi le cas du code d’honneur des officiers symbolisant qu’ils font partie d’une même caste et ont donc droit à des honneurs militaires, particulièrement quand ils se sont bien battus. C’est enfin la vision des premiers combats aériens comme des tournois entre combattants se respectant. C’est pour finir une conception qui s’est beaucoup réfugiée dans la représentation ultime de la guerre comme un jeu que sont les jeux vidéo. https://www.youtube.com/watch?v=5ohNzHWL7FI

Mais cette conception n’est plus la nôtre. Pourquoi ? Une polémique montre bien le changement d’ethos. Simultanément un militant d’extrême gauche autrefois emprisonné pour terrorisme est condamné à de la prison pour avoir dit que les terroristes du Bataclan étaient courageux https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/terrorisme/attaques-du-13-novembre-a-paris/pour-avoir-qualifie-les-terroristes-du-13-novembre-de-courageux-l-ancien-membre-d-action-directe-jean-marc-rouillan-est-condamne-a-8-mois-de-prison_1814151.html et un polémiste d’extrême droite est vu comme ayant dérapé pour avoir dit que : "Je respecte des gens prêts à mourir pour ce en quoi ils croient, ce dont nous ne sommes plus capables" http://www.europe1.fr/emissions/le-fait-medias-du-jour/eric-zemmour-accuse-dapologie-du-terrorisme-2868997 . De plus, imagine-t-on sincèrement des militaires français fraterniser à l’occasion d’une trêve impromptue avec des membres de l’Organisation Etat Islamique ou donner les honneurs de la guerre à un émir de l’état islamique ayant résisté héroïquement ? Nous ne considérons donc pas qu’ils se soient bien battus. Pourquoi ? La réponse est à chercher d’abord dans le pacifisme puis dans la seconde guerre mondiale. La pensée pacifiste voit la guerre et le fait de tuer dans une guerre comme essentiellement mauvaise. Dans ce contexte, elle peut refuser la guerre mais une telle attitude ne survit pas au moment où cette pensée devient dominante (cas des premiers chrétiens et de Constantin). La guerre étant donc injuste par nature, elle doit donc être juste. Or pour la justifier, il ne faut pas considérer l’ennemi comme jouant un jeu de contrôle de territoires et de guerres auxquels nous jouons aussi. Il faut que l’ennemi soit mauvais. Que soit clarifiée une chose : je considère l’organisation Etat Islamique comme un projet génocidaire, expansionniste, voulant éradiquer ce qui ne correspond pas à sa version de l’islam sunnite ayant mis en place une théologie du viol, et à éliminer. J’ai été ravi de la libération de Mossoul et encore plus de celle de Raqqa. Mais une telle vision a des conséquences : en premier lieu , la population civile est vue comme opprimée (car si l’ennemi est mauvais comment la population civile pourrait -elle le soutenir à moins d’être elle-même mauvaise ) ce qui amène à des erreurs stratégiques majeures (« pourquoi n’aiment t-ils pas leurs libérateurs ? » ). En outre, une telle conception mène à une guerre totale, ce qui est souvent peu assumé : si l’ennemi est mauvais, nous ne pouvons négocier avec lui (sauf s’il a une capacité de destruction trop importante). La guerre doit donc se poursuivre jusqu’à l’élimination de l’OEI. Enfin et surtout, une telle conception enlève cette possibilité de fraternisation entre combattants et tout ce qui va avec et favorise une vision de l’adversaire comme étant uniquement une cible à éliminer (le drone étant logique de ce point de vue). Une telle analyse pourrait être vue comme étant limitée aux conflits asymétriques mais bon nombre de ces caractères peuvent se retrouver dans la seconde guerre mondiale face aux forces de l’axe.

Dans un sens, le rapport du nazisme à la guerre peut être vu comme une perversion de ce rapport pacifiste à la guerre. En effet, il garde la même approche des combattants ennemis mais en y incluant aussi les civils (dans un darwinisme racial) et en voyant la guerre comme naturelle à l’humanité. C’est en partie cela selon moi qui explique le fait que des intellectuels idéologiquement proches du nazisme comme Ernst Jünger ou Ernst Von Salomon mais qui gardaient une conception traditionnelle de la guerre n’aient pas soutenu le nazisme (ou la conspiration d’officiers de la Wehrmacht dont Von Stauffenberg pour renverser Hitler) .
Cela nous pose une vraie question : nous ne voulons pas reconnaître une valeur y compris militaire à nos ennemis au sens où elle leur donnerait des qualités (nous préférons parler de folie sanguinaire ou de fanatisme). En même temps, nous affirmons notre humanité et notre volonté de trouver des solutions politiques aux conflits (ce qui nécessiterait de négocier avec les dits ennemis ou d’employer des moyens de lutte beaucoup plus violents pour les éliminer). Et nous ne voulons ni ne pouvons revenir à une société ayant une éthique traditionnelle de la guerre. Il est symptomatique d’ailleurs que les seuls groupes y revenant curieusement sont la gauche anti « colonialiste » au nom d’une haine totale des états occidentaux et que les solutions qu’ils proposent sont « ils nous ciblent pour des raisons politiques , arrêtons de leur en donner ». Je ne dis pas avoir de solution magique , je pose juste le problème.